Pourquoi il faut ouvrir la communication aux groupements d’officines

Avec une marge commerciale nettement en recul depuis trois ans, une attractivité affaiblie de la profession, l’arrivée de nouveaux entrants sur le marché, et un équilibre économique de plus en plus précaire, les officines pharmaceutiques sont d’ores et déjà sérieusement entrées en crise. La solution réside pour les officines dans le passage d’une logique de « dispensateur de médicaments » à une logique de services, dotant son offre d’une valeur ajoutée renforcée et dûment monnayée, mettant à profit sa compétence exclusive, son maillage territorial, et la relation de confiance comme de proximité qu’il entretient avec sa patientèle ? Rien ne sera possible sans d’importantes évolutions du cadre réglementaire.

La possibilité pour les groupements de pharmaciens (dont font partie environ 80% des officines) de communiquer sur ces nouvelles missions qui leur sont dévolues, fait partie des lignes qui doivent véritablement bouger.

Comme le montre la récente étude Astérès-Rinzen[1], cette ouverture de la communication aux groupements pourrait être porteuse de nombreux effets positifs. Elle permettrait en premier lieu d’améliorer l’observance (le coût estimé de l’inobservance est de 9 milliards d’euros par an), de renforcer la prévention en incitant à la consultation, et de favoriser une supervision efficace des traitements. Pour le seul cas du diabète, les études ont montré qu’un suivi par un pharmacien permettait une économie de 680 euros par personne pour 30% des patients parmi les moins sévèrement touchés, soit une économie possible de 850 millions d’euros par an en France. De même, des études ont mis en évidence une économie des dépenses dans la gestion des traitements de l’hypertension et une baisse des dépenses en médicaments dans le traitement du cholestérol (laissant espérer respectivement dans le cas français une économie de 80 et 170 millions d’euros).

Au total, l’étude citée évalue les économies permises par cette simple ouverture de la communication à environ 1,3 milliard d’euros minimum. Elle serait ainsi bénéfique à tous : au patient mieux suivi et évitant plus facilement les accidentes iatrogènes (les interactions malheureuses entre médicaments), au pharmacien mis en valeur et aidé dans sa phase de transition vers son nouveau modèle, et à l’Etat qui a besoin de réaliser des économies efficientes sur ses dépenses de santé. L’ordre des pharmaciens n’est pas fermé, loin de là, à cette proposition, puisqu’il vient apparemment de l’intégrer aux modifications apportées pour faire évoluer le Code de déontologie.

Une ouverture intéressante mais qui demande encore à être clarifiée sur le plan réglementaire, et affirmée définitivement. La proposition de nouveaux services et la mise en valeur des officines ayant fait des efforts en ce sens (notamment en s’engageant dans une démarche qualité éventuellement validée par un label) sont la seule planche de salut des officines dans le futur.

Ces actions ne seront pourtant pleinement efficaces pour toute la société que si elles peuvent faire l’objet d’une communication auprès du grand public, comme c’est le cas dans la majorité des pays d’Europe occidentale.

On ne saurait priver cette profession des armes que tous utilisent pour faire connaître leur valeur ajoutée ! La santé de demain, on le sait, sera personnalisée et participative (en plus d’être préventive et prédictive). Il serait alors pour le moins paradoxal que des régulations conçues au XXe siècle mettent un frein à la possibilité d’échange, d’information et de communication des officines vers leurs patients, dans l’intérêt de tous.

 

[1] Astérès-Rinzen conseil, « Le rôle de la communication et de la publicité des officines de pharmacie et de leur groupement », octobre 2016.

 

Tribune publiée dans l'Opinion